L'autobiographie

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Aux origines de l'autobiographie

A) Les premiers textes autobiographiques

On fait remonter en général la première autobiographie à Saint Augustin avec ses Confessions, au Ve siècle. Bien que le terme n’existe pas encore, c’est pourtant bien une forme d’autobiographie puisqu’il se raconte de sa naissance à l’âge adulte.

Au XVIe siècle, Montaigne, avec les Essais renouvelle à sa manière ce genre. Au siècle de l’humanisme, Montaigne entreprend une réflexion philosophique sur les grands sujets de son époque, tout en se racontant. Les éléments de sa vie sont alors une illustration à son propos.

Cependant, le grand précurseur de l’autobiographie est un auteur du XVIIIe siècle, Rousseau, qui affirme : « Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple, et dont l’exécution n’aura point d’imitateur ». L’objet ou le sujet des Confessions est lui-même et rien d’autre. L’auteur est à la fois le narrateur et le personnage.

Les auteurs du XIXe siècle lui emboîtent le pas et s’inscrivent dans ce type de style de narration pour parler d’eux. C’est à cette même époque qu’apparaît le terme « d’autobiographie », devenue aujourd’hui un genre littéraire à part entière.

À savoir

Le nom « autobiographie » est composé des termes grecs suivants : « auto » qui signifie « soi-même » ; « bios », qui signifie « la vie » ; « graphie » qui signifie « écrire ». L’autobiographie est donc le récit de sa vie par l’auteur lui-même.

B) Les règles de l’autobiographie

L’autobiographie impose le respect de certaines règles :

l’auteur, le narrateur et le personnage sont la même personne ;

le texte est rédigé à la première personne du singulier (attention, ce n’est pas parce que le « je » est utilisé dans une histoire, que l’on est en présence d’une autobiographie. Il faut que les autres conditions soient aussi respectées) ;

l’auteur passe un pacte avec le lecteur. Il s’engage à respecter l’authenticité de son discours, à parler de lui-même, à être totalement sincère dans son propos. On appelle cela le pacte autobiographique ou pacte de sincérité.

Ne pas confondre

Auteur : celui qui écrit l’ouvrage.

Narrateur : celui qui raconte l’histoire (ex. : l’auteur peut être un homme et le narrateur une femme).

Personnage : celui qui agit dans l’histoire.

Pourquoi se raconter ?

A) Mieux se comprendre et mieux comprendre le monde

L’autobiographie a pour objet de donner une place centrale au « moi intérieur ». Pour parler de lui, l’auteur s’y dévoile, parfois de façon impudique ; à travers l’écriture, il fait naître pour la seconde fois son enfance, qu’il prend plaisir à revivre ou qui peut aussi lui servir de catharsis (purification) pour se libérer de celle-ci si elle a été douloureuse et difficile.

L’autobiographie est également un moyen pour l’auteur de mieux comprendre le monde ou ce qu’il a vécu. Le recul et le temps peuvent permettre de trouver des éclairages ou des interprétations à ce qu’il n’avait pas perçu ou pas compris alors. L’auteur ne souhaite pas donner une vision universelle ou historique des faits mais simplement sa perception de ceux-ci au moment où il écrit.

B) Partager avec les autres

On n’écrit pas pour soi, mais aussi et avant tout pour les autres et pour partager ses émotions et ses sentiments, une expérience

Exemple

On peut citer les récits de voyage des pèlerins au Moyen Âge, à l’époque des croisades. Ces récits reflètent l’évolution de la situation, les lieux à visiter, les points d’eau et de ravitaillement. Ils signalent les zones dangereuses et celles à éviter absolument. Les pèlerins partagent un moment de vie, révélant aussi des motivations, des choix. À travers ces récits, on découvre des tranches de vie et des personnalités.

Aux XVIIIe et XIXsiècles, le développement de la presse, l’invention de la photo, le dessin et notamment la caricature trouvent leur espace dans les journaux. Or ces récits poursuivent plusieurs objectifs :

raconter ce qui est vu et entendu, de la manière la plus objective ;

faire voyager le lecteur ;

rendre compte de l’autre : avec parfois des préjugés, des stéréotypes dont le narrateur a du mal à s’exclure, malgré sa théorique obligation de neutralité ; car parler de l’autre, c’est aussi parler de soi et révéler sa personnalité, ses qualités et ses défauts.

Le XXe siècle et la mise au point des techniques du cinéma et plus tard de la télévision ont permis un réel élargissement de ces discours. Désormais, l’explorateur et le voyageur dessinent, photographient, écrivent.

Sous quelles formes parler de soi ?

A) Des formes multiples

Il existe plusieurs façons de parler de soi :

les lettres à des proches, par exemple, les lettres envoyées au XVIIe siècle par Madame de Sévigné à sa fille (épistolaire) ;

les récits de voyages, comme la lettre de Christophe Colomb à la reine d’Espagne. Au-delà de l’émerveillement ressenti devant ce « Nouveau Monde », c’est aussi sa perception des autres qui nous en dit beaucoup sur l’explorateur et sur la civilisation de son époque ;

le livre, mais aussi la caricature et la bande dessinée ;

les vidéos diffusées en ligne ou les documentaires, qui racontent des tranches de vie deviennent aussi un moyen pour parler autrement de soi et des autres. Plus vivants, laissant moins de place à l’imagination, ils attirent des spectateurs qui aiment découvrir par l’image ou qui n’aiment pas particulièrement lire ;

les blogs et les réseaux sociaux.

B) L’écriture

a) Le roman autobiographique

Dans le roman autobiographique, les procédés de l’autobiographie, et notamment l’emploi du « je », sont les mêmes. En revanche, l’auteur n’est pas tenu au pacte de sincérité de l’autobiographie dans lequel l’auteur-narrateur s’engage auprès du lecteur : la restitution de ses souvenirs, même si elle n’est pas totalement juste, en est sa perception, réelle et sincère. Dans le roman autobiographique, l’auteur peut s’attribuer des événements dont il n’a pas été directement l’acteur principal, mais qui lui paraissent indispensables pour nourrir son propre personnage.

Exemple

Dans son roman L’Enfant, Jules Vallès raconte son enfance et son adolescence particulièrement violentes et pénibles. Dans ce roman, et même s’il s’approprie le « je », son personnage ne porte pas le même nom. Il y a donc une forme de distanciation entre le narrateur et l’enfant et l’auteur n’est donc pas le narrateur. Même si une très large part de son ouvrage est une restitution de ses années scolaires, certains des événements qu’il relate ne lui appartiennent sans doute pas, bien qu’il se les soit appropriés.

b) L’autobiographie de fiction

Il s’agit d’un genre particulier où un auteur se met à la place d’un personnage, historique le plus souvent, et prétend écrire ses mémoires.

Ainsi, Marguerite Yourcenar a écrit les Mémoires d’Hadrien en 1951. Hadrien, empereur romain de 117 à 138 après J. -C., n’a laissé aucun texte autobiographique. Marguerite Yourcenar s’approprie donc la personnalité de l’empereur et utilise le « je ». Ces mémoires sont destinées au jeune neveu de l’empereur, Marc-Aurèle : « J’ai formé le projet de te raconter ma vie » fera-t-elle dire à Hadrien. Ce texte permet aussi à l’auteure de réfléchir et de parler de thèmes importants pour elle : l’amour, la mort, la dualité entre le corps et l’esprit…

Ne pas confondre

Attention à ne pas confondre les termes suivants :

l’autobiographie, qui respecte les règles énoncées précédemment ;

le roman autobiographique, où l’auteur fait référence à certains événements de sa vie, mais il peut en modifier des éléments, inventer de nouveaux personnages, provoquer d’autres dénouements ;

le roman, où l’auteur semble s’identifier au narrateur notamment par l’utilisation du « je », mais où l’histoire n’a pas de rapport avec sa propre vie ;

les mémoires, où l’auteur, le narrateur et le personnage se confondent aussi. L’auteur s’y présente davantage comme le spectateur et le commentateur critique des événements de son époque. Il est moins tenu de se livrer personnellement que dans une autobiographie.